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Le système Elsi fonctionne comme un "sol intelligent"

La société finlandaise MariCare propose deux technologies de sols connectés afin de sécuriser les résidents et faciliter le travail des soignants en Ehpad. Philippe Metzenthin, représentant de la société en France, et Cédric Lacresse, directeur d'un Ehpad associatif à Epinal, détaillent les solutions Elsi et eLea pour Gerontonews.

Après avoir équipé des Ehpad scandinaves et australiens, l'entreprise finlandaise MariCare s'attaque au marché français, explique Philippe Metzenthin, représentant et distributeur de la société dans notre pays. Dirigeant du groupe MEDeTIC Technologies, il prodigue des conseils auprès de collectivités ou de gestionnaires d'Ehpad. Il est aussi "intégrateur technologique", allant débusquer partout dans le monde "des solutions pertinentes pour les apporter clé en main aux clients français". Et selon lui, celles de MariCare en font partie.

La société propose deux solutions. Le système Elsi est à destination des futurs établissements de santé et Ehpad (à intégrer au moment de la construction) ou en passe d'être rénovés. Il s'agit d'une série de capteurs placés sous le revêtement de sol, au même titre que son concurrent le FloorInMotion Care de Tarkett, qui enregistrent l'activité des résidents.

Ces capteurs détectent les chutes et mettent en évidence des modèles de comportement pouvant servir de base afin de prévenir des anomalies. Ils peuvent sonner l'alerte en cas de sorties inopinées ou de comportements inquiétants, comme des passages trop fréquents dans la salle de bain, selon les paramètres définis par le gestionnaire et la fragilité du résident. Toutes ces informations sont ensuite communiquées à distance aux ordinateurs ou
appareils mobiles (DECT, tablettes ou smartphones) des infirmiers et aides-soignants, surtout la nuit.

A chaque capteur peut être assignée une mission particulière: "Ceux de la périphérie du lit peuvent activer un chemin lumineux" en cas de lever nocturne, et ceux devant la portefenêtre peuvent prévenir d'une sortie sur le balcon", détaille Philippe Metzenthin.

Elsi détecte les matières organiques, comme le sang ou l'urine

Le dispositif proposé par MariCare diffère de celui de Tarkett à deux niveaux, explique le représentant français. D'abord sur la technologie du capteur, dite "de mesure capacitive", autrement dit, "qui crée un champ électrique au niveau du sol qu'on vient perturber [quand on marche dessus]". Le capteur mesure la surface occupée au sol (plus elle est importante, plus la chute est suspectée). Le dispositif peut donc être installé sur n’importe quel type de
sol, même un parquet. L'autre technologie, basée sur les capteurs à pression, suppose un revêtement souple.

Mais surtout, le dispositif commercialisé par MariCare peut détecter la matière organique, comme l'eau, les épanchements d’urine ou du sang. En alertant les équipes, il permet à la fois d'éviter les chutes de résidents incontinents mais aussi les accidents du travail liés à des glissades accidentelles du personnel.

Enfin, le système Elsi est basé sur un serveur central situé dans la structure, rendant le système "indépendant de la connexion internet disponible dans l’établissement", vante la société. Pour installer Elsi, il faut compter "de 3.000 à 3.500 euros" par chambre, revêtement de sol inclus, précise son représentant.

Seul bémol, l'impossibilité d'installer le dispositif dans les salles de bain (la présence d'eau entraînerait des faux positifs à gogo). Pour Philippe Metzenthin, on peut pallier ce défaut en programmant les cellules placées devant la porte des salles de bains de façon à détecter l’entrée/sortie et à compter le temps de présence dans la pièce. "Si le séjour se prolonge anormalement", elles envoient une alerte.

Il est aussi possible d'ajouter en option des capteurs eLea (déjà sur le marché), non sensibles aux liquides organiques.

Le système eLea ne nécessite pas de changer le revêtement de sol

Ces capteurs peuvent aussi être utilisés dans le cadre du système "autonome" eLea (non rattaché à Elsi), la seconde solution développée par MariCare et commercialisée d'ici à fin mars 2016.

Il s'agit de capteurs fixés au mur et fonctionnant par ondes radio, cette fois pour les Ehpad anciens ou dont la rénovation ne prévoit pas le changement des sols. Le système revient à "environ 1.500-2.000 euros par chambre", indique Philippe Metzenthin.

La technologie consiste à découper une pièce en tranches horizontales. "Si le système détecte une présence uniquement dans les tranches inférieures, il en conclut qu'une personne est au sol", traduit le représentant et distributeur de MariCare.

Ce dernier émet cependant deux réserves sur eLea: premièrement, le serveur qui reçoit les informations et les retransmet sous forme d'alerte est à distance, sur internet. En cas de panne du serveur ou du réseau, et si les émetteurs ne sont pas connectés au système d'appel malade, l'alerte ne sera pas envoyée.

Autre faiblesse de cette technologie "hors sol", qu'il s'agisse d'eLea ou de dispositifs d'analyse vidéo avec des capteurs sous forme de caméras, "la présence de zones d'ombre" (sortes d'angles morts). En ce sens, il concède que la solution Elsi est plus fiable, mais nécessite donc de changer les sols.

"L'objectif n'est pas d'enlever du personnel"

Depuis 2005, Elsi équipe 10.000 chambres d'Ehpad en Scandinavie. En France, cela démarre doucement avec deux Ehpad. L'établissement public de Gannat (Allier) a installé le système récemment. L'Ehpad associatif les Bruyères (géré par le groupe SOS), à Epinal, l'utilise depuis 2012 en tant que pilote, nous explique son directeur, Cédric Lacresse.

La structure accueille 64 résidents, dont 12 en unité Alzheimer et 10 en accueil de jour. Le système a été installé il y a quatre ans, à l'ouverture de l'Ehpad, dans une seule aile (sur les cinq que compte la structure), correspondant à 12 chambres (hors unité Alzheimer).

"On annonce ce système comme de la détection de chute, mais c'est bien plus", s'enthousiasme le directeur. Paramétrable, il permet "d'isoler les personnes à risque et de déclarer par exemple les déambulations par zones. On peut donc décider d'être prévenu si le résident de telle ou telle chambre en sort durant telle plage horaire".

Pour Cédric Lacresse, la sécurité s'en trouve renforcée et le gain de temps pour les équipes est indéniable ("on évite les rondes systématiques chez les résidents à risque"), mais le directeur insiste bien sur le fait que "l'objectif n'est pas d'enlever du personnel, mais qu'il se consacre aux tâches les plus urgentes et précises."

"Une résidente s'était levée 21 fois pendant la nuit"

Si toutes les ailes de l'Ehpad avaient été équipées, l'accident d’une aide-soignante aurait pu être évité, relate-t-il. Cette dernière a glissé sur une flaque d'urine et écopé de "six mois d'arrêt de travail".

Autre exemple, un résident d'une chambre non équipée a chuté, vomi, et quelque temps après est décédé d'une pneumopathie d'inhalation. "Inconscient, il n'a pas pu sonner, or, si on l'avait détecté au moment de la chute, il aurait peut-être [été sauvé]", indique Cédric Lacresse.

Depuis sa mise en place, Elsi a déjà permis de déceler des chutes à temps, et le comportement anormal d'une résidente. "Pour les aides-soignantes, elle avait fait une grasse matinée jusqu'à 11 heures" or, elle s'était en fait "levée 21 fois la nuit précédente" et le lever tardif "ne faisait que compenser ses insomnies!", se souvient le directeur. "On a alerté le médecin traitant, auquel elle n'en avait jamais parlé", souligne-t-il.

La détection de tels comportements nécessite tout de même d'aller consulter le tableau de bord global de la nuit au quotidien. "Ce n'est pas encore mis en place", admet Cédric Lacresse, "mais on pourrait imaginer que le temps de ronde en moins effectué par la veilleuse permette de lui dégager une demi-heure pour vérifier le mouvement global sur la nuit passée".

Il préconise aussi de rester vigilant quant aux déclenchements intempestifs provoqués par le personnel de ménage en nettoyant le sol. "L'agent doit afficher sa présence dans la pièce pour annuler le système"… jusqu'à ce que le sol sèche, même s'il a terminé et a quitté la chambre. Ce qui implique l'absence du résident pendant ce laps de temps ou son immobilité sur le lit, sous peine de chuter pendant la mise en veille du système.

Constamment évolutif à l'image de l'état des résident, Elsi nécessite enfin "d'affiner constamment le paramétrage" (entrée d'un nouveau résident ou dégradation d'un état de santé), rapporte le directeur de l'Ehpad.

Claire Beziau
Journaliste
claire.beziau(a)gerontonews.com

gerontonews.com 18.2.2016

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